Duo 1 (2021) – Bilan Costa Rica
Où en sommes-nous ?
Après 40 jours passés entre São Paulo et Rio de Janeiro, nous devions nous rendre au Chili mais la quarantaine de 10 jours obligatoire, couplée au confinement le week-end remettait en cause l’intérêt de se rendre physiquement dans le pays. Une semaine avant notre départ, nous changeons nos plans et nous envolons pour le Costa Rica afin de contourner le Travel Ban des Etats-Unis (restrictions d’entrées pour les voyageurs en provenance du Brésil et de l’espace Schengen).
Communément appelé la “Suisse d’Amérique Centrale” ce petit pays de 5 millions d’habitants est l’endroit au monde qui compte le plus de biodiversité au mètre carré. Véritable eldorado, nous retrouvons ici la même situation sanitaire qu’a connu la France lors de l’été 2020. Les bars et restaurants sont ouverts et comme ce pays se vit en extérieur, nous ne ressentons aucune frustration liée au Covid.
Les visites d’entreprises sont néanmoins plus délicates et presque la moitié de nos échanges se feront en ligne. Ici, nous rencontrons beaucoup de saisonniers français en quête d’un meilleur horizon et de “digital nomades” (travailleurs en remote).
Nous passons notre première semaine à parcourir le Guanacaste, à retranscrire nos interviews du Brésil et à en dénicher de nouvelles costariciennes. Notre passage aux services économiques de l’Ambassade de France le premier jour nous permet de mieux comprendre leur culture du management et de nous aiguiller vers de nouvelles pépites.
Après 18 jours, nous nous envolons, un peu nerveux pour Los Angeles. Nous expliquons notre projet à la frontière et rentrons aux Etats-Unis, un soulagement pour l’Odyssée ! Avant de vous parler de Californie, de banque à but non lucratif ou de techs de la Silicon Valley, voici dans ce chapitre, nos découvertes du Costa Rica !
Quelles sont les différences culturelles observables ?
Nous ressentons un mélange vibrant de culture coloniale espagnole, d’héritage indigène, d’influence chinoise, jamaïcaine et américaine. Les ticos sont décontractés, amicaux et accueillants. Démilitarisé depuis 1949 au profit “d’une armée de professeurs” (8% du PIB est consacré à l’éducation), le Costa Rica nous étonne par le poids du secteur public (60% des recettes de l’Etat sont allouées aux salaires des fonctionnaires). Dans nos recherches, nous dénichons, plus rapidement que les précédents pays que nous avons visités, des organisations à but social et environnemental.
De nos interviews, nous comprenons que l’expression “Pura Vida”, véritable philosophie de vie positive du pays, est propice à une culture du “oui” en entreprise. Les costaricains sont très disposés et acceptent facilement de nouvelles tâches, sans pour autant les finir toutes dans les délais impartis. Point commun avec le Brésil, nous retrouvons ici, des longues journées de travail (contrat de 48 heures par semaine).
Pour rappel, nous écrivons pour chaque chapitre un point culturel où nous figurons nos ressentis et ce que nous avons compris de la culture du pays. Il s’agit donc d’indications qui ne représentent, en aucun cas, une quelconque vérité sur le pays.
La responsabilité sociale et environnementale
Une volonté nationale
“En 2035, mes petits-enfants auront la même empreinte carbone que celle qu’avaient mes grands-parents dans les années 40. Et en 2050, leur empreinte carbone sera nulle” déclare Carlos Manuel Rodríguez, alors ministre de l’environnement, lors de l’annonce du plan de neutralité carbone à horizon 2050. Le Costa Rica devient le premier pays au monde à proposer un plan aussi ambitieux.
Dans les années 90, le FONAFIFO est créé. Ce fonds national d’investissements forestiers (public) a l’ambition de devenir la première institution du pays en termes de financement responsable (projet de reforestation, gestion forestière, systèmes agro forestiers…). Depuis peu, leur PER (programme de réduction des émissions) propose à près de 6500 propriétaires forestiers 52$ par hectare détenu pour les inciter à préserver la forêt.
Des acteurs au service de la RSE
Nous avons interviewé Ethel, coordinatrice des pratiques de management responsable de l’alliance AED du Costa Rica. Cette organisation à but lucratif compte 120 entreprises, engagées pour le développement durable. AED ne certifie pas les entreprises mais les accompagne à travers des formations de leadership responsable et des moments d’échange où tous se réunissent.
“Notre alliance compte des entreprises de tous secteurs et de toute taille qui veulent s’engager dans le long terme en apprenant des autres. L’accompagnement a toujours eu plus d’impact que la certification.”
Un modèle collaboratif
Nous avons beaucoup apprécié notre visite de l’Université du Costa Rica, au bureau du management de l’innovation et du transfert de connaissances. Mauricio, ingénieur industriel de formation, nous a accueilli et expliqué que son rôle est de veiller à ce que toute découverte des cinquante chercheurs de l’université puissent bénéficier au plus grand nombre, dans un but non lucratif et social.
D’une application pour informer les touristes sur la dangerosité des courants, au changement du menu des cantines scolaires, en passant par le développement d’un cosmétique dans une petite ferme de Monteverde, Mauricio veille à réunir et faire travailler ensemble différentes parties prenantes qui ont des intérêts communs et sans que leur finalité soit liée au profit.
Des bonnes pratiques
L’appréciation chez Mobius
Mobius est un cabinet de conseil costaricien qui accompagne les organisations vers des modèles opales, au sens de Frédéric Laloux (raison d’être évolutive, plénitude et auto-gouvernance). David Bullòn est consultant et nous explique la différence (souvent oubliée) entre appréciation et feedback. Pour lui, le feedback possède une dimension objective et constructive qui doit être fait de manière collective, en revenant par exemple sur un projet et sous la forme d’un REX (retour d’expérience). Il ne doit pas être personnel, à l’inverse de l’appréciation qui est davantage subjective et gratuite. Il identifie alors cinq niveaux d’appréciation :
“Il faut savoir apprécier ses collaborateurs pour leur travail, leurs actions, leur relationnel, leur cadeau et leur temps”.
Il encourage les entreprises à disposer d’espaces (un tableau blanc dans un couloir ou un channel slack – plateforme de communication collaborative) qui permettent à chacun de laisser des messages d’appréciation, courts, parfois anonymes et à tout moment.
L’importance des besoins personnels pour l’Impact Hub de San José
Impact Hub est un des plus grands réseaux de communautés entrepreneuriales. Fort d’une centaine de Hubs et présent dans plus de 50 pays, Impact Hub mène des programmes d’incubation et de développement de start-up et scale-up à impact social et/ou environnemental. En plus de leur mission, nous avons aimé certaines pratiques de management au sein du Hub de San José que nous a présenté Cristina Vindas, directrice exécutive.
Il est pour elle primordial de respecter les trois cercles de besoins (personnels, interpersonnels et organisationnels) pour une meilleure collaboration. Elle demande à chaque personne de son équipe de comprendre ses besoins personnels pour mieux servir les besoins de l’équipe et in fine de l’organisation. Elle nous livre :
“Je sais que j’ai besoin d’organisation et de clarté dans mon travail, je préfère donc m’occuper de toute la programmation agile. A l’inverse, une de mes collaboratrices, a ce besoin d’être empathique, elle apprend donc le rôle de coach car les compétences d’executive coach sont aussi recherchés dans l’accompagnement de jeunes pousses…”
Enfin, elle nous explique que le besoin interpersonnel d’affection est un levier primaire d’engagement qu’une pratique d’appréciation (comme le tableau blanc de Mobius) peut favoriser.
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